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Alice’s Recension

Alice in Wonderland, translated by Emmanuèle Sandron, illustrated by Valeria Docampo, edited by Alice Éditions, Belgique, 2020.

Recreating Lewis Carroll’s fantastical universe in images is a challenging task and a rite of passage for any illustrator. In this edition of Alice in Wonderland, a sparkling translation from writer Emmanuèle Sandron, Valeria Docampo once again masterfully explores the rich possibilities of the picture book. In this hybrid work of art, two streams of meaning exist in conversation: the story recounted in words and the one whispered by the images. Fusing and transforming these two threads is a task that falls to the reader, who will produce an interpretation illuminated by their own inner world.

Valeria Docampo takes on this task from an utterly personal, passionate and contemporary perspective. In this work, the illustrator displays more stylistic freedom than ever before. As the story progresses, precise brushstrokes that recall a classical style of painting explode into expressive doodles worthy of a child’s hand. Realistic forms sit side by side with an extreme cubism and surrealism, elevated by a vibrant colour palette where there is room for both vibrant magenta as well as the delicate sunset tones of the classic tea party scene.

Perhaps this stylistic freedom is the means that the artist has found to communicate her own experience and internal vision of the story’s central theme: the challenge of growing up, dealing with both internal bodily changes and the pressures imposed on us by the outside world. Translating these personal experiences into images, she invites the reader to enter an oneiric space where the juxtapositions of time, space and identity that are so typical of dreams blend with iconic moments in the story and the illustrator’s personal experiences.

Valeria Docampo’s Alice is a girl in a chrysalis about to morph into a butterfly, still cocooned in the stiffness of a dress that looks more like a uniform, a metaphor for the Victorian society in which she finds herself caged.

“Who are you?” the Blue Caterpillar asks Alice. She doesn’t know it yet, but a call, an inner voice prompts her to dive into this challenging and chaotic universe in search of the answer. In her dedication, the illustrator evokes the courage of those who “(…) choose to follow that little voice that leads us to ask why things are this way, and not another.”

This is how we see Alice on the book cover: surprised by her physical changes and the nonsense of what she sees, yet determined to follow that voice and experience an adventure that will ultimately lead her to know herself.

The relevance and appropriateness of Carroll’s story for our time are reflected in the artistic depiction of the King, the Queen and their playing-card subjects. These almost two-dimensional characters speak of a society that has placed an emphasis on rationality and homogeneity to the detriment of humanity, individuality and physicality.

Valeria Docampo’s Alice is a contemporary heroine who, through accepting her humanity, has found her voice and the freedom within herself to reject all the structures that seek to subjugate her, restricting her right to grow and express her unique self. “You’re nothing but a pack of cards!” Alice screams graphically in the wonderful second to last spread, casting off all those constraints and blossoming as a young woman in the emotional ending.

Mallika Paritosh

Alice au pays des merveilles, traduit par Emmanuèle Sandron, illustré par Valeria Docampo, Alice Éditions, Belgique, 2020.

Recréer en images le fabuleux univers conté par Lewis Carroll est un passage initiatique pour tout illustrateur. Dans cette édition d’Alice au pays des merveilles, traduite par la plume dynamique d’Emmanuèle Sandron, Valeria Docampo explore remarquablement, une fois de plus, la richesse de l’album jeunesse, cette œuvre artistique hybride où dialoguent deux courants porteurs de sens : l’histoire racontée par des mots et celle murmurée par les images. Leur synthèse et leur métamorphose seront faites par le lecteur, à la lumière de son propre univers intérieur.

Valeria Docampo accomplit cette tâche d’un point de vue complètement personnel, passionné et contemporain. Dans son travail, cette œuvre est celle qui présente la plus grande liberté de style. À mesure que l’histoire progresse, le trait précis, rappelant un style de peinture classique, explose en crayonnages expressifs dignes d’une main d’enfant ; des formes réalistes coexistent avec un cubisme extrême et un surréalisme exalté par une palette de couleurs effervescente, où un magenta éclatant a tout autant sa place que les teintes délicates du coucher de soleil, dans la fameuse scène du thé.

Cette liberté stylistique est peut-être le moyen que l’artiste a trouvé pour communiquer sa propre expérience et sa vision personnelle du thème central de l’histoire : le défi que représente le fait de grandir, de faire face aux changements internes du corps et aux pressions qui nous sont imposées par le monde extérieur. En traduisant ces expériences personnelles en images, elle invite le lecteur à entrer dans un espace onirique, où les juxtapositions du temps, de l’espace et de l’identité, si caractéristiques des rêves, se mêlent aux étapes majeures de l’histoire et aux expériences personnelles de l’illustratrice.

Le personnage d’Alice de Valeria Docampo est une petite fille chrysalide sur le point de se transformer en papillon, toujours retenue par la rigidité de sa robe, qui évoque davantage un uniforme, une métaphore de la société victorienne dans laquelle elle se trouve enfermée.

Qui êtes-vous ? demande la Chenille bleue à Alice. Elle ne le sait pas encore, mais une impulsion, une voix intérieure l’incite à partir dans ce monde complexe et chaotique pour trouver la réponse. Dans sa dédicace, l’illustratrice se souvient du courage de ceux qui « […] choisissent de suivre cette petite voix qui nous fait demander pourquoi les choses sont comme ceci, et pas comme cela. »

C’est ainsi que nous découvrons Alice sur la couverture du livre : surprise par les changements de son corps et l’absurdité de ce qu’elle voit, mais déterminée à suivre cette voix pour vivre une aventure qui lui permettra finalement de se connaître.

La pertinence et la justesse de l’histoire de Lewis Carroll pour notre époque se reflètent dans la représentation artistique du Roi, de la Reine et du jeu de cartes, (« le peuple »). Ces personnages sont presque des êtres en deux dimensions, qui nous parlent d’une société accordant une importance capitale à la rationalité et l’homogénéité, au détriment de l’humanité, l’individualité, et la corporalité.

Le personnage d’Alice de Valeria Docampo est une héroïne contemporaine qui, en acceptant son humanité, a trouvé en elle la voix de la liberté, pour rejeter toutes ces structures qui veulent la soumettre, qui ne lui laissent pas le droit de grandir et d’exprimer son unique individualité. « Vous n’êtes qu’un paquet de cartes ! » crie graphiquement Alice sur la superbe avant-dernière double page, en faisant s’envoler toutes ces contraintes pour s’épanouir en tant que jeune femme dans l’émouvante fin.

Mallika Paritosh